Contact
communication [at] ens-paris-saclay.fr (Communication)

Ramarani Sethy ou la passion de la photochimie

Ramarani Sethy est en 3e année de thèse au Nara Institute of Science and Technology au Japon, sous la supervision du Professeur Tsuyoshi Kawai. Elle mène en parallèle ses recherches au sein du laboratoire de Photophysique et Photochimie Supramoléculaires et Macromoléculaires (PPSM) de l’ENS Paris-Saclay.
C’est sa formation au sein d’un des prestigieux IISER (Instituts Indiens en Science, Education et Recherche) qui l’a décidé à faire de la recherche en photochimie. Retour sur un parcours académique cosmopolite.

Pouvez-vous résumer votre parcours ?

Admissible à l’examen du concours d’entrée des instituts de technologie en Inde, j’ai rejoint  l’Indian Institute of Science, Education and Research de Thiruvananthapuram (IISER - TVM) grâce à une bourse du ministère de science et de technologie afin de poursuivre ma carrière dans les sciences. Lors de ma 5ème année, le doyen de l’institut, le Professeur K. George Thomas, m’a présenté le Professeur Tsuyoshi Kawai du Nara Institute of Science and Technology (NAIST)  à l’occasion de la conférence APC en photochimie (Asian and Oceanian Photochemistry Conference). J’ai trouvé le profil de recherche du Pr. Kawai si intéressant que j’ai postulé pour effectuer ma thèse sous sa supervision au NAIST grâce à une bourse du ministère de l’Éducation au Japon.

Quelles étaient vos motivations à faire des sciences ?

Initialement,  je voulais poursuivre une carrière d’ingénieur. En Inde, les étudiants suivent souvent cette voie. J’étais aussi attirée par la médecine. Mais en découvrant le programme intégré bachelor-master en sciences proposé au sein de l’IISER de Thiruvananthapuram, et aux possibilités de poursuite de carrière, j’ai décidé d’y suivre cette formation de qualité. L’enseignement de la physique m’a plu mais je me suis très vite tournée vers la chimie, avec le souhait de me spécialiser dans la photochimie. Lorsque je vois le résultat d’une expérience en photochimie, je suis un peu comme une enfant. L’on ne voit rien au premier abord, mais lorsque l’on envoie la lumière, alors tout devient brillant, plein de couleurs. Je souhaitais comprendre ce qui pouvait être à l’origine de ce genre de phénomènes.

Qu’avez-vous appris à l’Indian Institute of Science, Education and Research Thiruvananthapuram de Kerala ?

Dès les deux premières années, les enseignements ont concerné les sciences fondamentales (mathématiques, physique, chimie, biologie)… Ce sont des enseignements de très haut niveau qui m’ont permis d’acquérir les connaissances sur tous les sujets scientifiques et de faire les bons choix pour la 3ème année. J’ai choisi la chimie comme discipline principale, la biologie en seconde discipline ; j’ai ainsi pu appréhender ces deux domaines de recherche. J’ai eu une première expérience de 4 mois dans un laboratoire en biologie, sous la responsabilité de Professeur S. Murty, puis j’ai travaillé pendant un an au sein d’un laboratoire de chimie sous la responsabilité du Dr. Mahesh Hariharan sur un projet important. J’ai suivi d’autres stages en chimie qui m’ont fait découvrir différents champs de recherche et des techniques fondamentales en caractérisation analytique et spectroscopique (RMN, FTIR, GCMS) – pour caractériser et synthétiser les molécules organiques – et aussi des méthodes de purification en chromatographie (HPLC par exemple, technique de chromatographie de haute performance).

Quelles sont vos activités scientifiques au Nara Institute of Science and Technology (NAIST) au Japon ?

Au cours des deux premières années de thèse, j’ai travaillé sur l’auto-assemblage de systèmes organiques chiraux. J’ai été formée à différentes techniques spectroscopiques et j’ai acquis de l’expérience pour la modélisation et la synthèse de chromophores organiques. J’ai aussi mené des expérimentations en utilisant des techniques microscopiques de type MET (microscopie électronique en transmission) et MEB (microscopie électronique à balayage) et d’autres instruments spectroscopiques par exemple pour étudier le dichroïsme circulaire et la luminescence à polarisation circulaire. Toutes mes connaissances ajoutées à mon expérience en recherche ont amélioré ma compréhension de la photochimie et de la chimie supramoléculaire. J’ai aussi appris que le travail, la persévérance et la patience étaient nécessaires pour faire de la recherche. 

Qu’est-ce qui vous a incité à venir faire de la recherche au laboratoire PPSM de l’ENS Paris-Saclay ?

J’ai rejoint l’équipe de Rémi Métivier comme doctorante stagiaire pour faire de la recherche scientifique collaborative sur le sujet « Étude d’assemblages supramoléculaires chiraux par microscopie et spectroscopie de fluorescence ». Je travaille aussi au PPSM sur des techniques spectroscopiques pour mesurer la fluorescence résolue temporellement et sur des techniques en microscopie de fluorescence et microscopie à force atomique (AFM) pour comprendre les processus photophysiques internes de nos systèmes moléculaires. Notre équipe au NAIST avait déjà une collaboration avec le Dr Rémi Métivier au PPSM. J’ai donc réfléchi à un plan de recherche. J’ai ainsi rejoint l’ENS Paris-Saclay dans le cadre du programme de stage international de la Graduate school en sciences des matériaux du NAIST. Ce que j’aime en France c’est qu’après chaque expérience nous avons une discussion en équipe. C’est assez nouveau. Au NAIST, je travaille surtout sur la conception des systèmes en chimie et photochimie (systèmes « chiraux »). Ici je peux approfondir les mécanismes photophysiques des objets que j’ai préparés au Japon. Ainsi cela me donne une vue plus complète de mon sujet de thèse.

Portrait-25-RamaraniSethy-doctorantePPSM-web_1.jpg

Selon vous quels sont les avantages à préparer une thèse aujourd’hui ?

Grâce à la thèse, nous apprenons à traiter et à résoudre un problème de manière autonome. Les expériences scientifiques menées apportent une meilleure compréhension d’un sujet en particulier et améliorent le raisonnement scientifique. Pour les professions industrielles et académiques, le doctorat est une étape capitale pour faire de la recherche appliquée. L’expérience en recherche au cours d’un doctorat est une excellente formation pour établir une carrière indépendante.

Quel est votre sentiment sur la recherche en France ?

Si l’on compare entre les modes d’organisation de la recherche en France, en Inde ou au Japon, ce qui est différent, c’est sans doute la communication. En Inde, par exemple, on est très respectueux de notre hiérarchie et on ose davantage interagir avec les professeurs seulement au cours de la thèse car on a l’impression d’en savoir un peu plus qu’en master par exemple. En France, tout le monde communique avec tout le monde. Il y a peut-être moins de barrières dans la communication. Au Japon aussi on peut parler avec les professeurs. Le Professeur Kawai est très motivé au sujet de ma thèse, il est bienveillant et veille à ce que j’ai des perspectives professionnelles. Je discute beaucoup avec lui. C’est lui qui m’a proposé de venir en France et à l’ENS Paris-Saclay.

Quels sont vos souhaits pour l’avenir ?

Après la soutenance de ma thèse au NAIST en octobre prochain, j’aimerais me diriger vers une carrière académique et réaliser un post-doctorat en France avec la perspective de retourner en Inde ensuite pour entamer ma carrière professionnelle. Multiplier les expériences dans plusieurs laboratoires permet d’avoir une vue plus générale au niveau de la recherche.