L’art d’imbriquer toutes les sciences pour innover
En arrivant sur le plateau de Saclay en 2020, l’ENS Paris-Saclay s’offre un paquebot flambant neuf signé de l’architecte Renzo Piano et une place de choix sur la photo de l’Université Paris-Saclay, dans le top 20 mondial, à laquelle elle ajoute sa touche d’excellence à la française et ses valeurs de service public. Mais l’ENS révèle aussi, à la faveur de sa position dans le cluster saclaysien, son potentiel d’innovation, un atout resté jusqu’à maintenant confidentiel.
« L’ENS Paris-Saclay a évolué depuis sa création en 1912, confirme Philippe Maitre, son vice-président Recherche. Sa finalité ne se résume plus à former uniquement aux métiers de l'enseignement supérieur et de la recherche et à ceux de la fonction publique. Elle est capable d'offrir des parcours uniques à chacun de ses étudiantes et étudiants. Dans ce contexte, nous sommes particulièrement fiers d’avoir créé le club des startups affiliées pour accompagner nos 80 alumni qui ont monté des startups ». C’est d’ailleurs avec quelques-uns d’entre eux que l’École participe à Paris-Saclay Spring le 1er juin 2023, l’occasion de promouvoir plus largement le potentiel innovation de l’ENS.
Un potentiel transversal et agile
L’établissement se distingue d’abord par sa capacité à adapter rapidement ses formations pour mieux répondre aux enjeux du monde. « L’ENS Paris-Saclay est une full University, affirme le vice-président. Elle offre tout le spectre des disciplines, de l'ingénierie aux sciences humaines et sociales (SHS) en passant par les sciences de la nature, la biologie, la physique, l’informatique, les mathématiques et la chimie. Nos laboratoires SHS sont véritablement interdisciplinaires et nous avons également un département de design et un théâtre professionnel, le tout sur un périmètre restreint qui favorise la mixité des disciplines et encourage les échanges entre enseignement et recherche. Dans ce contexte, poursuit Philippe Maitre, notre force est d’offrir à l’écosystème de Paris-Saclay notre agilité à concevoir en un temps record de nouveaux diplômes universitaires dans des thématiques singulières ». Ces alliances réclament de savoir les mettre en musique à l’aide de nouveaux outils. « Nous recrutons par exemple à l’interface des mathématiques et des SHS pour notre chaire Design pour les transitions écologiques, l’une de nos trois chaires de professeurs juniors ».
Faire un pas de côté
Aujourd’hui, la majorité des normaliens ne passent pas l'agrégation en quatrième année. Ils optent pour une des alternatives proposées par l’établissement : effectuer un stage de recherche à l'étranger ou en faisant « un pas de côté » dans une autre discipline comme les technologies quantiques, l'intelligence artificielle, les transitions écologiques ou une formation recherche-création à l’interface arts-sciences. « Ces parcours associent étudiants et enseignants de différentes disciplines explique Philippe Maitre. Cette spécificité fait notre force. La formation des enseignants-chercheurs du secteur public demeure la priorité de l’ENS Paris-Saclay, mais aujourd'hui, nous accompagnons aussi des jeunes qui sont entrés à l’ENS avec une autre vision ».
L’idée que le normalien n’est pas destiné uniquement à devenir enseignant ou enseignant-chercheur commence donc à émerger. Le témoignage de l’aventure récente Antarctique 2.0 de trois normaliens, aujourd’hui doctorants, lors de la cérémonie de remise des diplômes de l’ENS Paris-Saclay, l’illustre parfaitement. Accompagnés par leurs enseignants, ils se sont embarqués sur un bateau et entament leurs recherches sur les transitions écologiques.
La transdisciplinarité, source d’innovation
Projet scientifique innovant, collaboration industrielle, transfert de technologie : toute idée est la bienvenue, qu’elle provienne des entreprises, des laboratoires ou des étudiants eux-mêmes qui profitent de tous les outils d’accompagnement à la création d’entreprise de l'écosystème de Paris-Saclay (Incubateur, dispositif Pépite PEIPS, SATT). Cet ancrage permet aussi à l’ENS Paris-Saclay de développer davantage ses relations partenariales, qui prennent la forme d’accords structurants ou d’accords spécifiques. « L’ENS entretient de très nombreuses relations contractuelles avec les industriels, à l’opposé de l’image qu’on pourrait avoir de l’École, confie Virginia Branco. Notre stratégie englobe tous les acteurs en quête d'innovation, des plus petits aux plus grands, avec l’objectif de pérenniser les relations existantes et de faire émerger des projets communs entre les entreprises et nos laboratoires ». « Nous avons ciblé une dizaine de grands industriels dont ceux présents sur le plateau de Saclay comme EDF ou Thales, renchérit Didier Guedra-Degeorges. Nous avons avec eux des partenariats stratégiques, sur des sujets technologiques transversaux qui nous permettent de travailler ensemble de manière interdisciplinaire. D’autres partenariats, comme avec Dassault Systèmes par exemple, visent une thématique plus spécifique, et enfin nous coopérons avec de plus petites structures, dans un esprit collaboratif ».
Les liens avec les entreprises se nouent de différentes façons, du stage de Master 2 aux chaires industrielles, en passant par des projets structurants, voire des laboratoires communs, comme avec le LabCom « Matériaux Cimentaires Eco-Efficaces » (MC²E), avec la société ECOCEM. L’ENS s’appuie sur ses axes transdisciplinaires, tournés vers une compréhension du monde actuel et l’anticipation de ses évolutions (technologies quantiques, développement durable, économie circulaire, design, enseignement numérique, etc). « L’ENS pratique la transdisciplinarité depuis longtemps en offrant une grande liberté à nos chercheurs et à nos étudiants. C’est ce qui nous rend aujourd’hui très attractifs au sein de l’écosystème de Paris-Saclay » conclut Philippe Maitre.
Science et Art
L'ENS Paris-Saclay porte naturellement des axes de recherche transversaux singuliers, notamment au sein du PEPR (programme et équipement prioritaire de recherche), autour des industries culturelles et créatrices. « Ces industries pèsent plus de 90 milliards d’euros de chiffre d'affaires, équivalent à celui de l'industrie automobile en France, développe Didier Guedra-Degeorges. Nous avons un théâtre professionnel sur lequel nous avons bâti avec l'Université Paris-Saclay une formation diplômante de recherche-création à l'articulation des sciences humaines et sociales et des sciences du numérique. Que vise-t-on in fine ? s’interroge Philippe Maitre. L’apport de l’art à la science et vice-versa. Les deux ont à voir avec la création ».
Santé et Design
« Oui, le design peut s’appliquer à la santé ! », s’exclame le chargé de mission relation Entreprises. Pour preuve, un projet innovant qui lie chercheurs en Design et mathématiciens de l’ENS ou encore en participant à un institut hospitalo-universitaire (IHU) lauréat cette année. L’idée est de s’appuyer sur l’IA pour analyser les interactions du patient avec son environnement. Instruments médicaux, comportements lors des traitements et des séjours à l’hôpital : tout est passé au crible dans l’objectif, à terme, de re-designer un environnement plus propice à tel ou tel type de pathologie.
Un nouvel outil au service de l’innovation
La transition entre enseignement et enseignement numérique est un des axes thématiques porté par la Graduate School Métiers de la recherche et de l'enseignement supérieur (GS MRES) que l’ENS Paris-Saclay pilote. Un nouveau programme de sensibilisation à l’innovation dans les métiers de la recherche et de l'enseignement devra voir le jour au sein de la GS (dans le cadre du projet PUI des investissements d’avenir dont l’Université Paris-Saclay est lauréate). Il s’agit pour l’ENS Paris-Saclay de structurer l'innovation, en coordonnant les actions de sensibilisation à la culture d’innovation des futurs cadres de l'enseignement supérieur et de la recherche.